Assistante de commissaire-priseur : guide pour comprendre le marché de l’art

Amélie Hajjouai : portrait de métier pour Place plume : assistante de commissaire-priseur

Bienvenue dans le deuxième volet de ce portrait de métier #4 consacré au métier d’assistante de commissaire-priseur. Pour lire ou relire, le premier volet, c’est par ici :

👉 Portrait de métier #4 – Assistante de commissaire-priseur de la théorie (part. 1)

Comme rappelé précédemment, Amélie Hajjaoui partage dans cet article un magnifique et détaillé portrait de son parcours vers le métier de ses rêves : celui de commissaire-priseur. Depuis toujours, sa vocation est claire : elle aspire à devenir commissaire-priseur. Je tiens aujourd’hui à exprimer ma gratitude pour son souci du détail et son engagement au travail, qui ont rendu possible la publication de deux articles inédits sur le monde fascinant du marché de l’art. Dans ce deuxième volet, Amélie nous plonge dans les coulisses de son métier.

Une fois diplômée, quel a été ton parcours ? Est-ce que c’était long de trouver un job ? Tu as eu du choix, des opportunités insoupçonnées ?

Après mes études, j’ai passé le premier été de ma vie à flipper tout en étant à la plage… J’avais peur de ne rien trouver. J’ai donc gardé par sécurité le dernier job étudiant que j’avais dans la vente pour avoir un vivier de secours. J’ai démarché toutes les maisons de ventes dans la région Centre, puis j’ai décidé de m’orienter sur Paris. J’ai toujours voulu monter sur Paris pour y travailler. Les postes sont très rares. Je savais donc qu’entrer en stage dans une étude me permettrait d’accéder à un poste en interne.

Mon but était de me faire connaître et de faire valoir ce que je savais faire pour être embauché à temps plein. J’ai fini par trouver un stage en juin 2019 et en janvier 2020, j’ai pu effectuer des renforts en tant que stagiaire au département bijoux. J’ai été embauchée avant même de finir mon stage tellement tout roulait.

Tu est assistante de commissaire-priseur, peux-tu nous décrire ton travail ? Est-il facilement accessible et à quel domaine appartient-il ?

Être « assistante de commissaire-priseur » veut tout et rien dire, car c’est très polyvalent. On peut être avec le commissaire-priseur H24 pour l’assister dans ses tâches au quotidien (ce qui recouvre pas mal de choses) ou, comme moi gérer toutes les après-ventes. On peut aussi être assistante au moment des ventes aux enchères.

Mon travail est de gérer le suivi de toutes les après-ventes sur plusieurs départements et plusieurs commissaires-priseurs. C’est un poste clef qui n’est pas très accessible dans le sens où les places sont chères et que les recrutements extérieurs sont rares. J’ai eu beaucoup de chances vraiment, surtout dans la période actuelle.

Je suis rattachée au service client de l’Étude MILLON. Je fais de la gestion de dossiers, de la régie des œuvres, de l’administratif, de la prise de rendez-vous. Comme assistante d’un CP, je gère également les demandes d’expertises d’inventaires et d’estimations.

J’aime ce métier, car c’est un métier levier pour moi, il me permet d’apprendre énormément de chose sur la législation des ventes aux enchères, sur le métier d’expertise. Je forme mon œil, et aussi, je suis multi-départements donc j’ai une vision globale de l’étude, c’est enrichissant.

J’aspire à devenir commissaire-priseur. Pour cela, il faut que je passe le concours. Je me suis encore jamais lancé, mais être dans ce milieu me donne une envie folle de me dépasser !

Quels sont les enjeux lorsqu’on travaille sur le marché de l’art ? Il y a-t-il des exigences particulières à prendre en compte ?

Je dirais que les enjeux sont de savoir allier Histoire de l’art et avec ses connaissances juridiques. Il faut être curieux et bien connaître le marché : c’est-à-dire savoir quelles maisons de ventes nous environnent, connaître ce qu’elles proposent comme ventes, se démarquer de celles-ci… Cela relève aussi du commerce et du management.

Pour autant, il ne faut pas être compétitif au point d’être seul. Ce métier, c’est aussi savoir être respecté et surtout savoir s’entourer en expert et cabinets d’expertises. Les mêmes noms ressortent dans le marché de l’art. En plus de cela, les maisons de ventes Françaises sont assez réputées grâce à un « savoir-faire à la française » dans ce domaine.

vente aux enchères caritative au profit des sinistrés de la vallée de la Roya : portrait de métier #4 (part. 2) - assistante de commissaire-priseur

Quelles sont les difficultés liées à la nature de ton métier ?

Il faut être mature. Ça paraît bête dit ainsi, mais c’est essentiel.

Par ailleurs, je pense que certaines personnes peuvent s’en sortir si elles rentrent très vite dans ce milieu. Une grande partie de la réussite se fait par les connaissances et les contacts. Le « réseautage » est très important. Dans ce milieu, tout se fait par réseaux. Les recrutements externes sont rares. En partie, parce que tout est basé sur la confiance et le fait de déléguer à son personnel.

Il faut être débrouillard et avoir déjà eu des expériences (stages, jobs étudiants…) qui apprennent la polyvalence. Ce sont des critères indéniables : autonomie, rigueur et polyvalence.

Pour toi, quelles sont les qualités essentielles pour ce métier ?

D’abord, il faut être à l’écoute du client, vendeurs comme acheteurs (relation de confiance). Ensuite, il est nécessaire de savoir être autonome, rigoureux, polyvalent. Je rajouterais : être exigeant avec soi-même, être droit, avoir de solides connaissances juridiques et en arts, être organisé. C’est la clef.

Quelles sont les erreurs à éviter et/ou les idées reçues que tu aimerais désamorcer à propos de ton métier ?

Par rapport à l’Histoire de l’art

Il faut arrêter de dire que nous allons tous finir caissier ou caissières et que ces études ne peuvent pas nous inscrire dans un avenir professionnel stable. Certaines personnes ne sont pas carriéristes et nous le sommes de moins en moins. Cette génération est révolue, je pense ; nous sommes dans la génération du cycle des 7 ou 8 ans.

Justement, avec de l’Histoire de l’art, on peut se réorienter facilement dans différents corps de métiers : être prof, être chercheurs, être dans le marché de l’art, être expert, être dans la fonction publique avec le domaine culturelle, intégrer une mairie être adjoint du patrimoine, être conservateur… Il y a beaucoup de métiers et de facettes à ces études que beaucoup ne voient que comme la filière bateau que l’on prend quand on ne sait pas quoi faire de sa vie.

Oui, faire de l’histoire peut être un choix réfléchi vers un métier réfléchi !

Il faut absolument demander et se renseigner sur tous les métiers possibles, en parler avec ses profs est essentiel.

Par rapport au marché de l’art

Le domaine du marché de l’art est vivement critiqué. Nous vendons des œuvres d’art qui pour des chercheurs en Histoire de l’art sont invendables, car ce sont des pièces de musées. Ce qui est vrai dans un sens. Mais, d’un autre côté, c’est aussi magnifique. Lors d’une dernière vente, l’étude Millon a proposé un Edgard Maxence (Fig. 1) qui a été préempté par le Petit Palais. De la même manière, un Van Loo a été préempté par un autre musée…

Je trouve cela fascinant. Oui, on vend des pièces incroyables et cela peut faire frémir ou jaser, mais, d’un autre côté, on fait aussi vivre l’Histoire de l’art à notre manière en découvrant des œuvres exceptionnelles. Regardez : récemment, une étude a réussi à s’unir à une autre grande étude renommée pour la vente d’un Van Gogh, c’est inédit !

Et grâce au marché de l’art, on peut aussi faire sortir des petits bijoux de nulle part. C’est le cas d’une célèbre étude tourangelle qui a fait vivre le Musée des Beaux-arts de Tours en faisant découvrir un Monet au grand public. Je trouve cela incroyable, mais le débat reste ouvert entre ce qui va au domaine du privé et à celui du public.

Oeuvre d'Edgard Maxence, peintre symboliste, préempté par le Petit Palais à Paris : portrait de métier #4 (part. 2) - assistante de commissaire-priseur
Fig.1 : Edgard Maxence «  Jeune femme jouant de la mandore » peintre symboliste qui a remporté une belle préemption du Petit Palais

Est-ce que le milieu du luxe et du commerce d’œuvres d’art est source de stress ? Quel type de profil correspond le mieux à ce milieu ?

Oui, c’est source de stress, car ça reste du commerce. Il faut savoir créer et garder son image de marque. On vend des œuvres au nom d’une étude, les clients nous mandatent en nous faisant confiance, le contrat doit être honoré et rempli. Les œuvres doivent être vendues en peu de temps pour éviter un dépôt trop long et au meilleur prix. Il faut
ensuite régulariser les vendeurs dans les plus brefs délais et savoir fidéliser nos acheteurs.

Il faut savoir entretenir tout cela. Un profil d’école de commerce n’est pas du tout négligeable en plus de l’histoire de l’art dans ce domaine. L’étude où je suis fait plus de 250 ventes aux enchères par an avec des ventes en salle et des ventes en ligne. C’est stressant et palpitant aussi… Il faut aimer bouger partout !

Et pour finir, ton métier en une image ça donnerai quoi ?

La banane d’Andy Warhol en sérigraphie = Toujours garder le sourire quoi qu’il arrive !

Un petit mot doux pour ceux qui hésitent encore ?

Il y a une phrase que mon grand-père tenait de sa mère qui a été mon leitmotiv durant toutes mes études : « Dures semailles, lentes moissons ». Rien ne sert de tout vouloir, au risque de tout perdre et de se perdre. Il faut savoir avancer pas à pas pour établir une belle moisson et être fier de soi.

J’ai passé 8 ans à la fac, ça fait 1 an que je suis dans le marché de l’art. Je dois encore passer le concours pour arriver au point ultime. Les semailles étaient dures, la moisson sera lente, mais tout vient à point à qui sait attendre 🙂

Assistante de commissaire-priseur en bref

– Autonomie, rigueur et polyvalence
– Passion/persévérance
– Franchise, valeur, honnêteté, confiance
– Gérer un suivi administratif/clientèle
– Connaissances juridiques requises
– suivi des ventes/achats
– Mener des recherches documentaires
– Connaissance en régie des œuvres
– Suivi des inventaires/classement
– Sens de l’organisation/respect des délais
– Travail sous pression/ponctualité
– Participer/organisation une vente aux enchères
– Coordonnée une équipe (management)
– Langue(s) étrangère(s) requise(s)
– Diplomatie et bonne humeur
– Sens du relationnel/dynamisme
– Notions en marketing et commerce
– Culture artistique/mémoire visuelle…

image de Mélanie Chagneau de melaniechagneau.wixsite.com : portrait de métier #4 (part. 2)
Crédit : image de Mélanie Chagneau de melaniechagneau.wixsite.com : Tous droits réservés

Conclusion

Amélie évolue dans le monde exigeant du marché de l’art. Ce domaine requiert avant tout polyvalence, autonomie, et rigueur pour atteindre le succès. Il offre également des opportunités riches, telles que les métiers d’experts, d’antiquaires, de commissaire-priseur, de courtier, de critique d’art, de consultant, ou de galeriste. Cependant, les recrutements externes demeurent rares, et la concurrence est forte. Un parcours académique solide et une première expérience dans le milieu peuvent faire toute la différence ! N’hésitez pas à vous dépasser !

✏️ N’hésitez pas à partager vos propres expériences et conseils dans les commentaires. Je serai ravie de découvrir de nouvelles ressources pour enrichir cette exploration.

 Envie de poursuivre la lecture ? Rendez-vous dans la rubrique Idées de métiers & vies d’entrepreneurs de Place Plume. Tu y trouveras des articles pour découvrir d’autres idées de métiers. Pour lire ou relire le premier volet de ce portrait, c’est par ici : Portrait de métier #4 – Assistante de commissaire-priseur de la théorie (part. 1)

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2 Comments
  • Anne

    Répondre

    C’est un parcours formidable !
    Mais il manque son niveau de rémunération aujourd’hui pour se faire une idée de la réalité de ce métier

    • Clémence

      Merci Anne pour votre commentaire, je suis ravie que vous trouviez ce parcours intéressant ! En ce qui concerne la rémunération d’un clerc de commissaire-priseur aujourd’hui, en général, elle se situe aux alentours de 2000 à 2600 euros bruts mensuels. Cependant, il est important de noter que ce montant peut varier en fonction de divers facteurs tels que l’expérience, la localisation géographique et la taille de l’entreprise. N’hésitez pas si vous avez d’autres questions ou si vous souhaitez plus d’informations sur le métier !

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